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EDITO – Contre l’extrémisme: les corps intermédiaires!

Contre l'extrémisme: les corps intermédiaires

Les récents sondages donnent le Vlaams Belang comme premier parti du Parlement flamand. En Wallonie, il n’y aurait aucun élu d’extrême droite. Et à Bruxelles, s’il y en a, ce serait aussi une présence du Vlaams Belang.

Alors qu’on observe une montée de l’extrême droite en Europe, voire dans le monde, il y aurait donc une exception: la Wallonie et, dans une moindre mesure, Bruxelles.

 

Les raisons de cette particularité

Plusieurs facteurs interagissent pour expliquer cette situation, mais un élément souvent cité est la présence de corps intermédiaires forts en Belgique francophone. Par corps intermédiaires, on entend habituellement les syndicats, les mutuelles et les associations. Ces acteurs sont des institutions qui améliorent l’interaction entre les élu·es et les citoyen·nes.
Dans une direction, ils font émerger des revendications et dans l’autre, ils traduisent parfois les décisions prises.

 

Le rôle de l’Economie sociale et solidaire (ESS)

L’économie sociale et solidaire fait-elle partie de ces corps intermédiaires?

Certainement! A sa manière! L’ESS regroupe des acteurs diversifiés tels que les associations et coopératives, dont les revenus proviennent principalement de ventes ou d’un mélange de ressources privées et publiques selon leur objet social. Un point commun réunit la majorité d’entre elles: elles peuvent être vues comme des «actions collectives mises en œuvre par des citoyens libres et égaux se référant à un bien commun» (associationnisme). Par leurs activités, les associations et coopératives de l’ESS poursuivent l’intérêt général. Elles répondent aux besoins sociaux de leurs publics en proposant des solutions et, dans le meilleur des cas, les impliquent (éventuellement aux côtés des travailleur·euses) à la gestion et/ou à l’orientation des entités créées. L’ESS est aussi souvent à l’origine de cadres légaux et réglementaires qui institutionnalisent les innovations sociales dont elle est porteuse et expérimentatrice.

 

Un enjeu: conserver la liberté associative

Un enjeu particulier pour l’ESS est à la fois d’être soutenue par les pouvoirs publics – lorsqu’elle poursuit des objectifs concourant à l’intérêt général – et, dans le même temps, de conserver sa liberté associative. Une liberté associative qu’on peut expliciter positivement et négativement.
Positivement c’est: la liberté de parole, de critique des politiques publiques et de proposition.
Négativement c’est: devenir instrumentalisé, voir son travail quotidien détourné de ses objectifs – par exemple par l’imposition d’outils et de méthodes par les financeurs publics.

 

Une responsabilité associative

Pour conserver la positivité de la liberté associative, il faut que le dialogue soit possible. Pour cela, on a besoin des oreilles attentives des pouvoirs publics, ce qui est largement rencontré.

Mais aussi, il y a une responsabilité associative. Nous devons avoir une capacité de parole commune et donc de concertation entre nous qui anticipe sur le tempo politique afin de ne pas uniquement répondre aux sollicitations mais co-construire en amont.

 

Une responsabilité des pouvoirs publics

Pour éviter une dérive négative de la liberté associative, il faut que les financements publics répondent systématiquement à certains critères. Ils doivent être:

  • co-construits de A à Z;
  • structurels et à long terme;
  • justifiés d’une manière qui soit utile aux deux parties et non sur base d’un rapport de méfiance trop souvent rencontré dans les faits.

Ces critères sont les garants d’un nécessaire socle de «sérénité associative» (le terme est porté par le Collectif des associations citoyennes).

Un contre-exemple inspirant nous est donné par l’éducation permanente dont la reconduction quinquennale repose en grande partie sur l’auto-évaluation menée librement par les associations soutenues et dont elles doivent rendre compte et tirer des enseignements.

Ici, la balle est dans le camp des pouvoirs publics et de nos prochains gouvernements. Et aussi, in fine, dans le nôtre en ce qui concerne la capacité à s’auto-évaluer et la manière de se montrer digne de la confiance éventuellement accordée.

 

Un village d’irréductibles solidaires en Wallonie? On peut s’en réjouir même s’il ne faut pas crier victoire trop rapidement. Rendez-vous au lendemain du 9 juin pour évaluer la situation*.

 

Quentin Mortier – q.mortier[@]saw-b.be

*Notamment lors de l’AG de SAW-B du 18 juin qui invite Caroline Sägesser du CRISP pour commenter les résultats des élections.

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