EDITO – Les marchés publics socialement responsables, un choix d’avenir!

Edito marchés publics responsables

Attribuer un marché public uniquement sur le critère du prix, c’est reléguer l’intérêt général au second plan. Les coûts sociétaux – exclusion, précarité, gaspillage, délocalisation, dumping social (…) – ne figurent pas dans la colonne des charges, mais ils pèsent lourd sur la société. Ce choix du « moins-disant » n’est pas neutre : il façonne nos territoires, nos emplois, notre environnement, notre vivre-ensemble. Il laisse croire que l’économie peut être dissociée du social et de l’écologique, que la performance d’un achat public se mesure à l’aune d’un chiffre, alors qu’elle devrait être évaluée à l’aune de son impact global.

À l’inverse, les marchés publics socialement responsables incarnent une vision ambitieuse : faire de chaque euro investi un levier de transformation sociale, environnementale et économique. La commande publique – qui pèse en Europe plus de 14 % du PIB – est un formidable levier pour orienter l’économie vers plus de justice sociale, de durabilité, de cohésion, de respect. C’est faire un choix d’avenir, celui du « mieux-disant », celui qui intègre dans la décision d’achat : la valeur sociale, la qualité environnementale, la relocalisation, les innovations, l’inclusion…

 

L’économie sociale: un allié naturel des marchés responsables.

Dans ce contexte, les entreprises de l’économie sociale sont des partenaires naturels de la commande publique responsable. Elles combinent savoir-faire technique, valeurs humaines et capacité d’innovation. Leur modèle met l’humain et l’environnement au cœur de leur action, tout en démontrant une réelle capacité à innover, coopérer et répondre aux besoins spécifiques des acheteurs publics.

 

Un partenariat entre l’ULB et Impact Furniture by Oxfam l’illustre à merveille. Pour aménager des espaces de convivialité sur le campus, l’université a choisi un marché intégrant des critères sociaux et circulaires. Résultat : 70 panneaux HPL sauvés de l’incinération, une dizaine de personnes en situation de handicap formées, et une collaboration où la concertation et l’écoute ont primé. Pauline Goffinet (ULB) et Jean-Michel Verlinden (Impact Furniture) ont témoigné [lien vers l’interview] de la qualité de cette collaboration, marquée par l’écoute, l’adaptabilité et le respect des valeurs de l’économie sociale. Cet exemple de partenariat montre qu’ils ont dépassé la simple exécution d’un cahier des charges pour construire ensemble une réponse sur mesure, à haute valeur ajoutée pour la collectivité.

Ce projet n’est pas un cas isolé : il témoigne d’une tendance de fond, celle d’achats publics qui cherchent à maximiser la valeur créée pour la collectivité, au-delà du simple prix.

 

Les valeurs, force de l’économie sociale.

Les entreprises de l’économie sociale incarnent une autre manière d’être avec le personnel : inclusion, formation, respect. Loin du modèle où la rentabilité prime sur l’humain, elles prouvent qu’on peut conjuguer performance et bienveillance. Dans le projet ULB, les délais de fabrication ont été adaptés pour permettre à une Entreprise de Travail Adapté de réaliser le prémontage, offrant ainsi une expérience professionnelle valorisante à des personnes fragilisées.

Cette attention à l’humain se traduit aussi dans la gouvernance : participation des salariés, transparence, partage de la valeur. Les entreprises sociales ne cherchent pas à maximiser le profit pour quelques-uns mais à créer de la valeur pour tous. Le profit n’est qu’un moyen, jamais une fin en soi.

Quant à l’innovation, elle ne se limite pas aux produits. Elle concerne aussi les processus, les partenariats et la gestion des ressources. À l’ULB, des plateaux de bureaux usagés ont été transformés en mobilier, réduisant les déchets tout en générant de l’emploi local.

 

Les marchés publics, un levier de relocalisation et de résilience.

Les marchés publics socialement responsables favorisent aussi la relocalisation. En privilégiant des circuits courts et des partenaires locaux, ils dynamisent l’économie d’une région, créent de l’emploi et réduisent l’empreinte carbone. Ils permettent de lutter contre la délocalisation, le dumping social et la dépendance à des fournisseurs lointains ou peu scrupuleux. Les territoires sont ainsi plus résilients et développent une capacité à faire face aux crises, à s’adapter, à rebondir.

 

Replacer l’intérêt général au cœur de la commande publique.

C’est pourquoi, chaque marché public attribué à une entreprise d’économie sociale, participe à créer ou à maintenir des emplois locaux, à développer ou former des personnes à de nouvelles compétences, à structurer des filières en circuit court, à encourager de nouvelles façons de coopérer et à s’assurer d’une gestion optimale des ressources. L’achat public n’est donc pas seulement un acte technique, c’est aussi un acte politique, au service de l’intérêt général.

 

Les vrais coûts du moins-disant.

Choisir le prestataire le moins cher cache souvent une facture sociale et environnementale que la société paie à long terme : précarité, pollution, perte de savoir-faire. À l’inverse, les achats responsables permettent de générer de la valeur partagée, en tenant compte de l’impact global.

 

Les défis à relever : simplifier, massifier, reconnaître.

Pour généraliser ces pratiques, trois grands défis se posent :

  1. Simplifier les procédures pour permettre aux entreprises, qu’elles soient d’économie sociale ou non, d’accéder plus facilement aux marchés.
  2. Massifier les pratiques responsables pour qu’elles deviennent la norme, et non l’exception.
  3. Reconnaître la valeur et l’expertise des entreprises d’économie sociale  afin de leur donner une place équitable sur le marché.

 

Un avenir à construire ensemble. 

Faire le choix des marchés publics socialement responsables, c’est assumer une responsabilité collective. Ni utopie, ni contrainte, il s’agit d’une voie concrète vers une société plus juste. A chacun: décideurs, entreprises d’économie sociale, entreprises conventionnelles, acheteurs publics, facilitateurs et citoyens de s’inscrire dans cette démarche pour qu’elle devienne la norme de demain!

 

Un édito de Laurent Drousie.

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