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Terre-en-Vue – facilitateur d’accès à la terre en Belgique

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À l’époque où de plus en plus de fermes agricoles disparaissent au profit de grandes exploitations industrielles, l’association Terre-en-Vue soutient depuis dix ans l’accès à la terre en Belgique pour des projets porteurs de sens. Comment expliquer ce phénomène d’appropriation des terres agricoles ? Comment Terre-en-Vue travaille avec et pour les agriculteurs et agricultrices en vue d’une levée de fonds ? Mais aussi, quels impacts a eu l’association sur ses bénéficiaires ? Entre évaluation d’impact social et changement d’échelle imminent, nous avons discuté avec Alix Bricteux, chargée de communication de l’association depuis 2019.

 

Faisons un court voyage dans le temps et revenons au début des années 2010, période où le Réseau de Soutien à l’Agriculture Paysanne (ReSAP) mandate un groupe de travail pour mettre en place des outils de facilitation d’accès à la terre en Belgique. C’est là que nait le « Mouvement Terre-en-Vue ». Un mouvement aujourd’hui composé de 3 structures :

  • Une asbl subsidiée par les pouvoirs publics ;
  • Une coopérative qui achète les terres agricoles et les loue aux agriculteurs et agricultrices ;
  • Une fondation financée d’une part par de l’argent mais aussi par des terres, et qui soutient l’association et la coopérative dans une perspective de long terme.

Maintenant que le décor est planté et que vous avez un aperçu plus précis de ce qui nous occupera dans cet article, plongeons ensemble dans ce qui occupe Terre-en-Vue aujourd’hui !

 

Préserver des fermes à taille humaine

Dans une vidéo diffusée sur leurs réseaux sociaux (mettre le lien), l’association explique que depuis 30 ans, en moyenne 43 fermes disparaissent chaque année au profit de grandes exploitations industrielles et 62 agriculteurs·trice·s quittent la profession. Cela élève les pertes des petites fermes (moins de 50 hectares) à hauteur de 63% ! Mais comment expliquer ce phénomène ? Alix éclaircit ces chiffres et appuie le fait que « plein de facteurs entrent en jeu ». Il faut d’abord prendre en compte le vieillissement de la population d’agriculteur·trice·s : « Il y a peu de repreneurs. Les hectares disparaissent et sont repris par les grosses industries. On migre d’un modèle de ferme à taille humaine vers des fermes qui s’agrandissent (de 60 à plusieurs centaines d’hectares). Ce ne sont plus vraiment des agriculteurs…. ». Ensuite vient la question de la reprise en tant que telle : « Il est très compliqué, lorsqu’on n’est pas issu du monde agricole, de créer ou reprendre une ferme. Souvent, c’est l’histoire d’une vie, ça ne se fait pas en un claquement de doigts. De plus, au début, les montants sont astronomiques et malheureusement le métier ne crée pas de vocation. Il manque des porteurs de projet et les connaissances ». Enfin, et non des moindres, la spéculation fait rage : « En Belgique, contrairement à la France, il n’existe pas de régulation de la politique foncière agricole (vente-achat). C’est donc devenu un marché où tout le monde peut spéculer, une valeur refuge, le terrain de jeu d’investisseurs étrangers. Il y a peu d’offre et la moitié d’entre elles sont achetées par des sociétés privées. Cela influe à la hausse sur les prix et empêche la transmission et/ou la reprise des fermes ».

 

Le défi de la ferme des Arondes

… Et pourtant, d’irrésistibles résistent encore et toujours ! « « Le collectif de la ferme des Arondes a cherché une ferme à vendre qui répondait à leurs critères. Une fois la prise de contact effectuée et la promesse de vente des propriétaires, ils sont venus nous voir avec une demande très précise », nous raconte Alix avant de nous présenter en quoi ce projet est innovant : « Déjà, c’est la plus grosse levée de fonds jamais entreprise via Terre-en-Vue. Pour la première fois Terre-en-Vue va acquérir du bâti agricole alors que jusqu’à présent, nous n’avions que les terres. C’est la raison pour laquelle le montant est si élevé. Vu le profil et la situation de la ferme, et les 6 jeunes avec chacun leur projet, ça nous paraissait le bon moment de se lancer. On n’aurait pas osé faire cela avant ».

 

Une équipe renforcée

« Il a fallu pousser nos limites par rapport à notre fonctionnement juridique et financier habituel » confesse Alix. « Mais c’est un collectif super motivé qui ont eux-mêmes amené une partie du financement pour mener cette levée de fonds. Tous les weekends en avril et mai, ils organisent des journées portes ouvertes et nous travaillons aussi de notre côté, vers notre réseau. Ce projet occupe une grosse partie du temps de travail de notre équipe cette année » continue-t-elle, précisant que l’équipe de Terre-en-Vue s’est agrandie et est composée aujourd’hui de 13 personnes. « Terre-en-Vue est propriétaire du bâti et le met à disposition du collectif. Cela permet beaucoup de liberté à l’occupation, ainsi qu’une garantie de récupérer leur investissement de départ si une personne s’en va et est remplacée par une autre. C’était la demande de base, très légitime de leur part et cela permet de ne pas être uniquement dans une relation propriétaire-locataire ».

Si vous voulez leur donner un coup de pouce, c’est par ici que vous trouverez toutes les infos et les démarches pour devenir coopérateur ou coopératrice : Ferme des Arondes – Terre-en-vue. Le collectif doit atteindre le palier du million d’euro pour permettre au projet de voir le jour !

 

Evaluer son impact social avec SAW-B, pourquoi faire ?

Alix le confirme : Terre-en-Vue est en passe d’opérer un changement d’échelle important. « On est à un point pivot dans la vie du mouvement. Pour pouvoir aller de l’avant, mieux communiquer sur notre impact et nos résultats, il faut l’évaluer ». En plein processus d’élaboration du questionnaire à destination des coopérateur·trice·s, adhérents et toute personne en contact avec l’association depuis sa création, plusieurs questions se posent : « Nous voulons savoir comment Terre-en-Vue a impacté les personnes impliquées dans le mouvement. Y a-t-il eu des changements de leurs comportements de consommation ? Sont-elles plus ou moins impliquées dans des associations ? Leurs connaissances du milieu agricole et de l’alimentation durable sont-elles meilleures ? » De nombreuses questions – cruciales pour mieux cibler leurs actions dans les prochaines années.

 

L’avenir de Terre-en-Vue, quelques perspectives

D’ailleurs, les prochaines années, parlons-en ! Quels sont les plans pour la suite ?  « Nous souhaitons être capable de pouvoir répondre à toutes les sollicitations qui arrivent (et elles sont nombreuses !). Aujourd’hui, notre capital social s’élève à 4 millions d’euros et on sent qu’il va devoir doubler pour pouvoir y arriver, le tout dans un laps de temps trois fois plus court que 10 ans ». Mais ce n’est pas tout ! Rappelez-vous, nous parlions de la question de la transmission des fermes : « Cela fait deux ans que nous organisons des cafés-transmission. Ce sont des moments de rencontres informels entre les cédants et les repreneurs. L’idée est de faire venir un binôme qui témoigne de son expérience. On aimerait qu’il y ait un organisme dédié à cette question car il n’existe pas de guichet unique qui centralise toutes les informations. Nous aimerions débloquer un budget auprès de la Région wallonne pour mener ce projet ». Pour faire vivre tout cela, Terre-en-Vue s’entoure d’un réseau de bénévoles, malheureusement déforcé après deux ans de covid : « Nous aimerions redynamiser notre réseau car il soutient directement les fermes. N’ayant pas pu se rendre en présentiel dans les fermes et chez les citoyens, la base s’est un peu effritée ».

 

Le petit plus d’Alix…

Au-delà de permettre aux agriculteurs et agricultrices d’avoir accès à la terre dans notre pays, Terre-en-Vue souligne l’importance du rôle social de cette terre. Elle n’est pas seulement considérée comme nourricière mais développe de réels liens sociaux une fois les terres acquises. « Il faut continuer à faire vivre la vie citoyenne autour d’elles ! » conclut-elle.

 

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