Nubo – Pour un numérique plus éthique et qui respecte la vie privée!
Le numérique est omniprésent dans nos vies. Il est majoritairement défini et contrôlé par les géants du Net appelés aussi GAMAM (Google, Apple, Meta, Amazone, Microsoft). Nous y sommes, ou y avons été, toutes et tous confrontés. Quelles sont les alternatives possibles à leur utilisation ? On en a parlé avec Emma Kraak de la coopérative Nubo qui propose des services numériques éthiques.
Emma est chargée de communication chez Nubo. Nous nous sommes donné rendez-vous en ligne histoire de s’imprégner au mieux de notre sujet.
Emma s’est très vite tournée vers le numérique. Diplômée en communication socio-culturelle, elle a aussi étudié à l’Ecole de Recherche Graphique de Bruxelles. Son parcours professionnel a débuté dans le milieu socio-culturel dans des « projets ancrés dans l’économie sociale et solidaire ». Elle a intégré ensuite l’asbl Constant qui est active à Bruxelles dans le champ des arts numériques. Emma y a découvert l’univers des logiciels libres. Dès 2017, Constant a soutenu le projet naissant de la coopérative Nubo, fondée par plusieurs associations engagées sur la question du numérique. C’est par ce biais que Emma a intégré l’équipe de Nubo en janvier 2020.
Pourquoi intégrer Nubo ?
Accompagnée à ces débuts par Coopcity, Nubo est une coopérative qui offre aux particuliers des services de mailing et de cloud (stockage de données en ligne). «L’objectif de Nubo est de pouvoir proposer un accès quotidien à des services informatiques éthiques et libres qui respectent la vie privée et qui ne participent pas à l’économie de la surveillance. C’est-à-dire une économie où nos données en ligne sont constamment surveillées pour être analysées à des fins commerciales la plupart du temps mais aussi à d’autres fins qu’on ne peut pas toujours deviner».
Il y a un enjeu de sensibilisation important pour Nubo afin de faire passer le message de la nécessité d’un numérique plus humain. Pour l’aborder de manière concrète, Emma aime comparer le numérique éthique à l’alimentation durable et responsable. Une tomate qui a poussé chez un producteur local est plus savoureuse qu’une tomate de l’agro-industrie qui n’a pas eu le temps de mûrir sur pied. Un outil informatique libre comme alternative aux GAMAM l’est tout autant. Nubo veut proposer quelque chose d’identique en maintenant ses propres serveurs et en favorisant le travail de développeurs locaux. Le goût en est certainement meilleur!
Reprendre la main sur sa vie privée numérique
La dimension collaborative de Nubo est cruciale dans le développement de la technologie informatique de la coopérative. «Les aspects coopératifs et techniques se nourrissent. Car l’idée c’est aussi de pouvoir mettre la main à la pâte et de démystifier certains éléments liés à la technologie. On touche ici aux questions d’émancipation et d’autonomie numérique».
De nombreux acteurs y participent. Des membres de six organisations actives dans la sensibilisation aux logiciels libres ou au numérique éthique sont présentes au conseil d’administration. Les bénéficiaires sont invités à devenir coopérateurs car leur participation soutient la volonté de transparence et de gouvernance démocratique, en leur permettant de devenir co-propriétaires de la structure. Principes qui sont par ailleurs véhiculés dans le domaine des logiciels libres. Il y a clairement une cohérence entre la manière dont ceux-ci sont développés et le modèle économique et de gouvernance de Nubo. C’est par le collectif que la coopérative soutient l’idée d’une reprise de contrôle sur les données privées numériques.
Un enjeu de taille pas toujours si évident à faire comprendre.
Emma le concède, le numérique reste difficile à appréhender. Pourtant, la plupart des gens y est confrontée quotidiennement et aurait beaucoup de mal à s’en passer. La difficulté d’appréhension réside dans la dématérialisation et l’invisibilisation du numérique. Ce sont leur utilisation et leur finalité qui posent question. «Dans le fond, que sont ces outils technologiques? Comment sont-ils faits? A quoi servent-ils? Comment les utilise-t-on?». Beaucoup des publics auxquels s’adresse Nubo sont confrontés à ces questions. Même les personnes les plus convaincues gardent cette difficulté d’éprouver la complexité du numérique. Malgré tout Emma souligne «que des personnes qui sont déjà sensibilisées à d’autres questions sur l’alimentation, la justice sociale ou d’autres questions éthiques, vont plus vite se saisir des questions liées au numérique ou franchir le pas vers le libre. Il y a comme une « convergence des luttes » qui existe à ce niveau-là.»
Et Nubo dans 10 ans?
Pour Emma, il faut continuer le travail de sensibilisation pour bien comprendre les tenants et les aboutissants du numérique. Le recours aux alternatives libres du numérique reste en effet minoritaire. Afin de les visibiliser davantage, Nubo souhaite s’appuyer sur d’autres structures d’économie sociale qui ne sont pas nécessairement actives dans le secteur du numérique. «Nous, on fait ça qui est éthique et vous, vous faites cela, comment peut-on se soutenir? Quelle cohérence donner à ces collaborations?». Le défi pour Nubo est de devenir un espace où les personnes peuvent venir partager leurs questions et leurs compétences à propos du numérique. C’est faire vivre l’aspect coopératif pour que «Nubo puisse servir un grand nombre de personnes avec des solutions numériques éthiques. Si on peut participer à une nouvelle « puissance numérique » saine, ce serait super.» C’est tout ce qu’on espère pour Nubo!
Olivier de Halleux
Plus d’infos sur le site de Nubo.
©Lucie Castel, licence CC BY SA 4.0
Partagez :