Edito – L’économie sociale et solidaire, ici et maintenant!
SAW-B a beaucoup évolué au fil de ses 40 ans d’existence développant une fidélité créatrice aux intuitions des personnes fondatrices en 1981. Parmi ces idées, ce désir de «reprendre pouvoir» sur un ou plusieurs aspects de la vie économique et sociale (extrait de nos statuts fondateurs). Et ce refus d’un «modèle économique qui attaque l’organisation sociale en détruisant les liens sociaux et les solidarités, exacerbe les inégalités et la paupérisation, piétine l’environnement et menace le climat» (extrait de notre manifeste[1]).
Tout au long de son histoire et encore en 2023, SAW-B ne s’est jamais contentée de sa mission fonctionnelle ni de la place qu’on voulait lui octroyer. De manière permanente, nous avons cherché et nous chercherons encore à déborder de toutes parts cette mission et cette place.
A titre d’exemple, la poursuite de réflexions et d’actions dans le champ de la recherche participative démontrent la capacité et l’importance que les associations fassent et revendiquent de faire de la recherche (ce qui n’est pas toujours attendu par les autres acteurs institués comme les universités et les politiques).
Autre exemple, la réflexion entamée l’an passé sur les manières de rendre compte de nos actions et de nos financements publics qui «renforcent les motivations, l’efficacité et la liberté intrinsèques des institutions évaluées plutôt que de les assujettir à des normes externes à l’esprit de leur activité»[2]. Trop souvent les indicateurs imposés de l’extérieur, parfois proposés de l’intérieur, se transforment en chevaux de Troie d’une gestion capitaliste dont nous devons nous démarquer.
Ces dernières années ont aussi été marquées par une réorganisation interne importante. Celle-ci a été motivée par une volonté de correspondance plus grande entre les visées que nous poursuivions et la manière de nous organiser en interne pour les obtenir. Si nous plaidons pour un approfondissement de la démocratie, il nous revient de l’expérimenter en notre sein! Aujourd’hui, alors que cette réorganisation est mise en œuvre, nous voulons réaffirmer notre identité originale vers l’extérieur et bien sûr vers et avec nos membres. Car faire vivre une association, «c’est […] s’inscrire dans une chaîne d’institutions», c’est se laisser «inspirer par ceux pour qui on travaille», c’est «se connecter à toute la société et notamment à tous ceux qui travaillent à la transformer», «c’est agir sur et dans d’autres champs […] en se connectant [à d’autres protagonistes] », c’est sortir d’un «entre-soi coupé du monde»[3].
Aujourd’hui, à travers deux démarches transversales, SAW-B souhaite offrir le meilleur service à ses membres pour les aider dans leurs propres missions et ainsi augmenter leur et notre impact social et politique :
- La première est une démarche d’intégration et de connexion entre nos différentes actions et services pour les acteurs de l’économie sociale et solidaire. Trop peu d’échanges et de passerelles existaient entre notre travail d’animation et la formation, la recherche-action, l’accompagnement, l’intercoopération, l’évaluation d’impact social, le plaidoyer. Par ces rapprochements et réflexions croisées, nous cherchons à mieux répondre aux besoins de nos membres et des autres organisations qui nous sollicitent.
- La deuxième est une démarche de constitution d’«une communauté en mouvement». SAW-B se veut rassembleuse. Elle est la seule association qui réunit toute la diversité de l’économie sociale et solidaire et qui met ces acteurs en mouvement dans un projet de transformation de la société, sur base des valeurs essentielles de l’économie sociale[4].
Faire mouvement ensemble avec une communauté forte, ça passe par une identité commune claire: celle de l’économie sociale et solidaire reconnaissable à ses quatre principes éthiques (finalité sociale, lucrativité limitée, décision démocratique et participation, autonomie de gestion), celle d’une économie sociale qui démontre que l’économique ne peut et ne doit être réduit au marché, celle d’une économie sociale et solidaire qui est convaincue que la démocratie économique ne peut et ne doit se réduire aux seules et indispensables institutions démocratiques mais doit s’élargir aux espaces publics autonomes que constituent potentiellement chaque association ou coopérative d’économie sociale.
Faire mouvement ensemble avec une communauté forte, ça passe par une opposition forte aux verrous économiques, culturels et politiques qui empêchent la société que nous voulons d’advenir. A quoi ressemblerait une économie dominée par l’économie sociale et solidaire? Quelle société découlerait de la concrétisation de cette utopie: «l’économie sociale et solidaire, ici et maintenant»!? Une campagne de plaidoyer vient d’être lancée sur ce thème (des réponses à cette question, des revendications, des expériences éprouvées à partager et sur lesquelles s’appuyer) dans les prochains mois en vue de peser sur les orientations des prochains gouvernements. Participez-y car c’est ce n’est qu’ensemble que nous irons plus vite et plus loin dans l’indispensable et urgent changement de notre société.
[1] https://saw-b.be/manifeste/
[2] Alain Caillé, «Les indicateurs de richesse alternatifs, une fausse bonne idée ? Réflexions sur les incertitudes de la gestion par le chiffre», in Revue du Mauss permanente, texte publié le 25 octobre 2010.
[3] Tiré de l’intervention de Jean Blairon lors de la 100e semaine sociale du MOC et du texte publié par la revue Politique, «Quel devenir associatif?», hors-série n° 7, 2022..
[4] Pour rejoindre la communauté: https://saw-b.be/communaute/
©Barn pour Unsplash.
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